Ponette sait que sa mère est morte, mais son père veut s’assurer qu’elle l’a bien compris, et faire face en lui avouant lui-même son désarroi, son impuissance. Dans cette scène, comme dans le film, tout repose sur les épaules de la petite actrice, qui interprète Ponette : on doit croire aux émotions qu’elle ressent, et ici, pour qu’on y croie, il faut qu’elle les éprouve vraiment. Jacques Doillon veut éviter la psychologie factice, les mots d’adultes dans la bouche d’enfants, les fausses larmes, pour cette séquence délicate de face à face entre le père et sa fille, qui doit être d’une vérité absolue. Pour commencer, il inscrit la scène dans le monde : le paysage et la lumière de fin d’après-midi, d’une grande beauté, participent à l’émotion du spectateur. Ensuite, tout en parlant de cette chose très grave, la petite fille doit effectuer des gestes précis : elle grimpe plusieurs fois sur le toit de la voiture, et redescend en glissant sur le pare-brise. Elle est lestée d’un plâtre qui l’encombre (choix du réalisateur pour faire exister le personnage de Ponette) : c’est à la fois un jeu, une cérémonie, une catharsis. L’étrangeté de cette gymnastique qui apparaît comme un évitement de la part de Ponette, face à la situation, donne à la scène une grande justesse : au-delà des mots terribles qui sont échangés, c’est la mécanique des gestes effectués, leur répétition qui permet à l’émotion d’advenir, et à la petite actrice de se laisser gagner par des affects biens réels : Ponette pleure, hoquette, crache pour de vrai pour conjurer la mort. Cette séquence difficile a été tournée à deux reprises et de manière non synchrone avec l’histoire, exceptionnellement : située au tout début du film, elle fut filmée au début puis re-filmée à la fin du tournage, le temps pour la petite fille de devenir une actrice, de mettre ses affects au service du personnage qu’elle incarne.
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Ponette sait que sa mère est morte, mais son père veut s’assurer qu’elle l’a bien compris, et faire face en lui avouant lui-même son désarroi, son impuissance. Dans cette scène, comme dans le film, tout repose sur les épaules de la petite actrice, qui interprète Ponette : on doit croire aux émotions qu’elle ressent, et ici, pour qu’on y croie, il faut qu’elle les éprouve vraiment. Jacques Doillon veut éviter la psychologie factice, les mots d’adultes dans la bouche d’enfants, les fausses larmes, pour cette séquence délicate de face à face entre le père et sa fille, qui doit être d’une vérité absolue. Pour commencer, il inscrit la scène dans le monde : le paysage et la lumière de fin d’après-midi, d’une grande beauté, participent à l’émotion du spectateur. Ensuite, tout en parlant de cette chose très grave, la petite fille doit effectuer des gestes précis : elle grimpe plusieurs fois sur le toit de la voiture, et redescend en glissant sur le pare-brise. Elle est lestée d’un plâtre qui l’encombre (choix du réalisateur pour faire exister le personnage de Ponette) : c’est à la fois un jeu, une cérémonie, une catharsis. L’étrangeté de cette gymnastique qui apparaît comme un évitement de la part de Ponette, face à la situation, donne à la scène une grande justesse : au-delà des mots terribles qui sont échangés, c’est la mécanique des gestes effectués, leur répétition qui permet à l’émotion d’advenir, et à la petite actrice de se laisser gagner par des affects biens réels : Ponette pleure, hoquette, crache pour de vrai pour conjurer la mort. Cette séquence difficile a été tournée à deux reprises et de manière non synchrone avec l’histoire, exceptionnellement : située au tout début du film, elle fut filmée au début puis re-filmée à la fin du tournage, le temps pour la petite fille de devenir une actrice, de mettre ses affects au service du personnage qu’elle incarne.