Dans cette scène, la fiction s’interrompt momentanément pour nous permettre d’observer, en temps réel, les effets de l’attraction sur un corps contraint, celui de Jean Pierre Léaud, qui joue le personnage d’Antoine. C’est également un dispositif très contraint pour le cadreur qui ne peut filmer que selon deux axes, d’en haut en plongée ou sinon, qui doit prendre place lui-même à l’intérieur de la machine, attaché par des cordes à l’axe du tambour. La caméra bouge très peu, c’est le rotor lui-même qui impulse le mouvement et le rythme, à l’exception de légers recadrages opérés pour se rapprocher d’Antoine, afin de saisir les émotions et les sensations qui s’expriment sur le visage de l’acteur, ou à travers ses gestes incontrôlés : l’impatience et le ravissement d’abord, le plaisir de pouvoir jouer et expérimenter (lever les bras, mettre la tête en bas) puis le désagrément, et presque la souffrance, quand le corps est condamné à subir une force bien trop puissante pour lui et échoue dans ses vaines tentatives pour déjouer l’attraction terrestre (il ferme les yeux, se frotte la tête…). L’alternance des plans en légère plongée sur Antoine, et les contre champ sur les visages des spectateurs nous font à la fois entrer dans la subjectivité du personnage, et ressentir quelques effets : le montage rapide, l’image qui saute et se brouille, les sons confus, mêlant bruits mécaniques et cris, provoquent une perte de repères et un léger tournis chez le spectateur. Au coeur de ce dispositif, qui fait naître des images rappelant celles le praxinoscope, dont celles, très intrigantes, de ces corps-insectes, imprimés sur la pellicule, François Truffaut s’est invité lui-même : il est l’un des participants à l’attraction, aux côtés de son personnage principal, qui sort en titubant de la machine.
Commentaire
Dans cette scène, la fiction s’interrompt momentanément pour nous permettre d’observer, en temps réel, les effets de l’attraction sur un corps contraint, celui de Jean Pierre Léaud, qui joue le personnage d’Antoine. C’est également un dispositif très contraint pour le cadreur qui ne peut filmer que selon deux axes, d’en haut en plongée ou sinon, qui doit prendre place lui-même à l’intérieur de la machine, attaché par des cordes à l’axe du tambour. La caméra bouge très peu, c’est le rotor lui-même qui impulse le mouvement et le rythme, à l’exception de légers recadrages opérés pour se rapprocher d’Antoine, afin de saisir les émotions et les sensations qui s’expriment sur le visage de l’acteur, ou à travers ses gestes incontrôlés : l’impatience et le ravissement d’abord, le plaisir de pouvoir jouer et expérimenter (lever les bras, mettre la tête en bas) puis le désagrément, et presque la souffrance, quand le corps est condamné à subir une force bien trop puissante pour lui et échoue dans ses vaines tentatives pour déjouer l’attraction terrestre (il ferme les yeux, se frotte la tête…). L’alternance des plans en légère plongée sur Antoine, et les contre champ sur les visages des spectateurs nous font à la fois entrer dans la subjectivité du personnage, et ressentir quelques effets : le montage rapide, l’image qui saute et se brouille, les sons confus, mêlant bruits mécaniques et cris, provoquent une perte de repères et un léger tournis chez le spectateur. Au coeur de ce dispositif, qui fait naître des images rappelant celles le praxinoscope, dont celles, très intrigantes, de ces corps-insectes, imprimés sur la pellicule, François Truffaut s’est invité lui-même : il est l’un des participants à l’attraction, aux côtés de son personnage principal, qui sort en titubant de la machine.